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Notre premier contact avec le piano de Brahms,
aussi loin que nous remontions dans nos souvenirs: un langage
musical totalement inconnu et nouveau, qui semblait rompre avec ce
qui l'avait précédé: Bach, Beethoven, et même Schumann. Un sens de
l'immensité, au sein de laquelle la palette infinie des
atmosphères et des sentiments se dissout et se fond dans le calme
et le silence absolus, en une absence totale de limites comme si
les codes, les frontières de la musique occidentale étaient, pour
la première fois, brisés et dépassés, rejoignant aussi bien par
l'étirement du temps que par la sauvagerie passionnée du langage,
un ailleurs ...
Un piano d'une beauté absolue. Dans le calme, une profondeur
insondable dans la suggestion des paysages internes ou l'évocation
sereine ou douloureuse des sentiments. Dans la violence et la
passion, la sauvage grandeur du fauve. Un son nouveau, à la fois
profond et puissant dans sa densité. Cette beauté, aussi bien,
elle se révèle dans le pianisme, la nouveauté de l'écriture
pianistique qui, si elle apparaît la digne héritière de Bach,
Beethoven ou Schumann, annonce et appelle l'avenir.
Les 17 Valses pour piano à quatre mains et la Sonate en fa mineur
pour deux pianos, que nous avons choisi d'associer dans cet
enregistrement, représentent à nos yeux la quasi-totalité de
l'univers musical et pianistique de Brahms, autant par les
différences qu'elles présentent que par la présence de leurs
caractères communs. Nous y avons été confrontées à un travail sur
la précision, la souplesse, le modelage de la phrase dans la
musicalité et la puissance, sans jamais perdre de vue la maîtrise
du geste et de la forme.
Les Valses, dans leur version pour piano à quatre mains,
constituent la version originale de cette oeuvre, ainsi que les
Danses Hongroises, ou plus tard, les Danses Slaves de Dvorak.
Elles constituent l'un des trois volets de ce que l'on pourrait
nommer "l'écriture viennoise" de Brahms pour le piano, avec les
Liebeslieder Walzer ou les Noue Liebeslieder Walzer écrites pour
la même formation, mais cette fois avec l'agrément du quatuor
vocal. Une musique de salon, pourrait-on dire, très éloignée de
l'univers plus libre, plus sauvage et plus passionné des Danses
Hongroises. Par leur concision, la précision de leur écriture,
elles s'inscrivent dans le prolongement des Landler de Schubert,
tout en se distinguant par la verticalité de l'écriture et
l'extrême diversité des mouvements, des thèmes et des caractères.
La douce rêverie, la tendresse, la grâce, la nostalgie y côtoient
la joie, la virtuosité joueuse ou brillante.
Composée sous le coup de l'émotion causée par la mort de Schumann,
tout d'abord sous la forme du quintette à cordes puis pour deux
pianos, et finalement, sur les conseils de Clara, en quintette avec
piano, la Sonate en fa mineur est incontestablement l'un des sommets
de la production pianistique de Brahms, au même titre sans doute que
ses deux Concertos pour piano.
Dans le premier mouvement qui par ses dimensions et la grandeur de l
' inspiration, représente le sommet de l'oeuvre, le premier thème,
énoncé par l'unisson des deux pianos en un legato proche de celui
des cordes, laisse progressivement la place à une confrontation de
ce thème amplifié en un déferlement sauvage. Le second thème, dans
sa douloureuse mélancolie, est présenté successivement aux deux
pianos, et leur alternance apparaîtra à trois reprises, en une
amplification toujours plus véhémente.
L'admirable phrase de l'Andante, un poco adagio, confiée au second
piano, s'apparente, par son calme et son doux balancement, aux plus
beaux lieder de son auteur. Elle se déroule sur un rythme obsédant
de croches détachées à la manière de pizzicati de cordes. Elle n'est
reprise au premier piano qu 'après une complète exposition.
La précision, l'acuité et l'apreté rythmiques des cordes est
magnifiquement transposée pour les deux pianos dans le scherzo
central.
Le Finale, introduit par un sostenuto énigmatique et plongé
dans une inquiétante immobilité traversée d'accents menaçants,
annonce déjà Schoenberg et l'Ecole de Vienne. Il développe ensuite
un thème à la hongroise sous la forme d 'un rondo en un rythme de
double-croches nerveuses. La phrase du second thème, exposée dans un
long étirement, est livrée à une confrontation abrupte entre les
deux pianos protagonistes, avant un "presto, non troppo" qui
précipite tout le mouvement vers la fin vertigineuse.

Chantal et
Gisèle Andranian
Lauréates du Conservatoire National Supérieur de Musique, de
l'Ecole Normale de Musique et de la Fondation Cziffra, elles se
sont formées auprès de Pierre Barbizet, Lucette Descaves, Jean
Micault pour le piano, Pierre et Nelly Pasquier, Geneviève Joy
pour la musique de chambre. Elles ont choisi d'orienter la
majeure partie de leur activité sur le duo de piano (piano à
quatre mains et deux pianos) et ont pu ainsi explorer, au fil de
multiples concerts, la majeure partie du répertoire pour cette
formation, et notamment les musiques française et russe.

As far as we can trace it back in our memories, our first
contact with Brahm’s piano pieces turned out to be a completely
unknown and new musical language to us. It seemed to clash with
everything that had been made before him: Bach, Beethoven and
even Schumann’s music. We came across a sense of wide open
spaces in which the vast range of atmospheres and feelings
seemed to evolve into complete calm and silence. It abolished
any limit as if all the western world musical boundaries were
disrupted and exceeded for the first time. It felt like the time
stretching it involved as well as the passionate ferocity of
language reached a world beyond ours.
Brahm’s piano
pieces are endowed with stainless beauty. In the quieter parts,
we can find an unfathomable depth that conjures up intimate
sceneries and peaceful or painful feelings. On the other hand,
in the more violent and passionate parts, we can feel a sense of
wild greatness. It appeared to us as being a new sound, both
deep and powerful in its intensity. That beauty also reveals
itself in the novelty in the piano writing. It follows in Bach,
Beethoven and Schumann’s footsteps and at the same time
initiates a new path turned towards the future.
According to
us, the 17 waltzes for four hands piano and the F-minor Sonata
for two pianos that we chose to associate in this recording
almost entirely represent Brahms’ musical and pianistic world.
As a matter of fact, they are very different pieces but also
have a lot in common. We worked on the musical phrase
preciseness, flexibility and shaping without ever losing sight
of our control over gesture and form.
The waltzes for four hands piano constitute the original version
of this musical work as are the Hungarian Dances and later on
Dvorak’s Slavonic Dances. They make up one of the three parts of
what we could call Brahms’ “Viennese writing” for piano. The
Liebeslieder Walzer and the Noue Liebeslieder Waltzer were
written for the same musical piece but this time a vocal quartet
was added. We could say that it is a salon music that stands
very far from the freer, wilder and more passionate world of the
Hungarian Dances.
The conciseness and accuracy in their writing relate Brahms’
waltzes to Schubert’s Landler but also break with them because
of their vertical writing and their large variety of movements,
themes and characters. Gentle reverie, tenderness and nostalgia
combine with playful and bright virtuosity.
The F-minor Sonata was composed just after Schumann’s death when
Brahms was in a highly emotional state. It was first written for
a string quintet, then for two pianos and finally became a piano
quintet on Clara’s advice. This Sonata is without a shadow of a
doubt a musical piece where Brahms reached the peak of his
pianistic work and it is to be put on the same level as his two
Piano Concertos.
Its first movement because of its duration and great inspiration
constitutes the highest point of the musical work. The first
theme starts with a harmonious combination of two pianos in a
legato that comes close to a strings one and slowly evolves into
a confrontation of this theme with a wild surge. The second
theme with its painful melancholia is played in turns by two
pianos and this alternation will appear three times in a more
and more vehement development.
The Andante wonderful phrase, a poco adagio, was given to the
second piano. Because of its calm and gentle swinging, it shares
similarities with Brahms’ most beautiful lieders. This phrase
develops with a haunting rhythm created by separated quavers in
the same way as pizzicato strings. It is taken up again only
after a complete exposition.
The accurate, acute and harsh rhythm conveyed by the strings is
beautifully transposed for the two pianos in the central
scherzo.
The Finale starting with an enigmatic sostenuto and driven into
a disturbing stillness with threatening tones already shows the
way to Schoenberg and the Vienna School. It focuses afterwards
on a Hungarian theme taking the shape of a rondo and creating a
rhythm with vigorous double quavers. The phrase in the second
theme is presented through a long stretching and given away to
an abrupt confrontation between the two piano protagonists. Last
but not least, a “presto non troppo” rushes the whole movement
into a breathtaking ending.

Chantal
and Gisèle Andranian
Graduates of the Conservatoire National Supérieur de Musique, L’
Ecole Normale de Musique and of the Cziffra Foundation, Chantal
and Gisèle Andranian learned the piano with Pierre Barbizet,
Lucette Descaves and Jean Micault. They had Pierre and Nelly
Pasquier as well as Geneviève Joy as chamber music teachers.
They chose to focus the main part of their musical work on piano
duos (four hands piano and two pianos). Through their
involvement in countless concerts, they got to explore the main
part of the repertory for this music group, especially French
and Russian music.

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