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Paderewski, Szymanowski
David Leszczynski, piano

POL 151 274


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Ignacy Jan Paderewski
Mazurka op. 9 n° 3
Mazurka op. 9 n° 4
Polonaise op. 9 n° 9
Variations et Fugue op. 23
Cracovienne Fantastique op. 14 n° 6
Chant d’Amour op. 10 n° 2


Karol Szymanowski
Variations sur un thème folklorique polonais en si mineur op. 10

 

 

 

   
         
   

À une vingtaine d’années d’intervalle naissaient, dans la deuxième moitié du XIXème siècle, dans une région de Pologne qui appartient aujourd’hui à l’Ukraine, deux personnages qui ont chacun, à sa manière, marqué la vie musicale polonaise et joué un rôle d’ambassadeur de leur pays auprès du monde.
Ce disque se veut être une "phonographie" de leur activité respective à une période où les premières inquiétudes qu’amenait le XXème siècle ne tardèrent pas à se concrétiser en un conflit mondial. Alors que Paderewski, au faîte de son activité de pianiste et de compositeur, se montre viscéralement attaché à des modèles du siècle précédent, Szymanowski commence son cheminement de compositeur moderne par des pages qui laissent déjà présager sa future évolution vers de nouveaux horizons.

Vingt ans d’écart… mais ces vingt années ont, ô combien, pesé dans la façon qu’eut chacun d’eux d’accueillir le nouveau siècle et ses détonations, tant politiques qu’artistiques… Au moment dont nous parlons, Paderewski est déjà dans la force de l’âge, il a derrière lui de nombreux concerts, mais aussi un mariage malheureux et une expérience douloureuse de la paternité. Son style s’est cristallisé autour des échos d’un XIXème siècle vieillissant, dont il gardera à jamais la nostalgie. Szymanowski, lui, est encore étudiant, et se prépare à découvrir l’Europe en pleine mutation avec toute la curiosité et l’avidité d’apprendre d’un homme chez qui tout reste à modeler. Son œuvre de l’époque, tout influencée qu’elle est par Chopin, Wagner ou Scriabine, contient déjà les prémices de ses orchestrations chatoyantes et exotiques.
Cette divergence de perception et de jugement de ce qu’apporte le siècle nouveau est également due aux profondes différences de caractère entre les deux artistes. Paderewski fut un conquérant conservateur, imposant sa façon d’être et ses idées, jusqu’au moment où, se sentant trop en décalage, il préféra s’effacer pour œuvrer sur d’autres terrains. L’âme de Szymanowski était, elle, voyageuse et assimilatrice ; il parvint à intégrer dans son art des influences très diverses, se nourrissant du penchant nouveau pour l’art extra-européen, tout en écrivant une musique toujours en lien avec un folklore imaginaire polonais dont il fut, avec Chopin et Paderewski, un des créateurs les plus inspirés.

Un siècle plus tard, Polonais atterri en France par hasard depuis une vingtaine d’années, je contemple les trajectoires si divergentes de ces deux hommes. Entre nous, le prisme de la redéfinition de la
"polonitude" de Gombrowicz, la satire de Witkacy, la perversion de Lupa, la dictature du général Jaruzelski. Et pourtant, l’attrait de leur pose reste puissant, leur engagement authentique et "positif", reléguant bien des personnalités qui leur ont succédé au rang de contradicteurs heureux de raser d’imposants bâtiments, sans toujours savoir quoi édifier à leur place. Après les chocs subis au XXème siècle, la culture et l’identité polonaises sont toujours en reconstruction, et je leur souhaite d’aboutir non à un retour à une identité passéiste et révolue, mais à la découverte d’un lien nouveau et authentique avec le passé, en affirmant avec conviction ses composantes originales et en se débarrassant des complexes dont elle reste aujourd’hui chargée.

Alors que la musique de Szymanowski s’est imposée depuis une dizaine d’années sur les scènes internationales, celle de Paderewski reste largement méconnue, voire inconnue du public occidental. Notre manière d’écrire l’histoire de la musique étant basée sur la rhétorique du progrès, les grands compositeurs seraient uniquement les novateurs, ceux qui regardent l’avenir, alors que les musiciens qui ont eu le malheur d’être trop longtemps tournés vers leurs origines profondes sont rapidement taxés d’une mélancolie suspecte (maladive ?), voire, insulte suprême, d’un manque d’originalité les reléguant au rang des compositeurs de second ordre. L’érosion du temps qui passe les a condamnés au mutisme, si l’on excepte de rares cas, (comme celui de Rachmaninov), qui ont réussi à préserver leur voix malgré les attaques incessantes des "connaisseurs" et grâce à la sensibilité d’un public pour qui l’intérêt d’une musique ne réside pas seulement dans son caractère innovant, mais également dans son contenu propre. Autrement dit, il est possible d’entendre une œuvre pour elle-même, et non seulement par rapport à toutes les autres.
Il me semble qu’il y a là une confusion dangereuse entre l’intérêt d’une œuvre d’art et celui des résultats de recherches d’un scientifique… Vue sous cet angle, la musique de Paderewski a effectivement peu de chances d’intéresser grand-monde. Mais sa force n’est-elle pas, comme dirait Gombrowicz, dans son "immaturité", sa jeunesse, dans sa légèreté qui ignore son devoir de progrès, son devoir d’être "géniale" ? Cela se peut bien. Et si l’on en croit les canons de jugement de l’auteur de Ferdydurke, Paderewski pourrait donc bien se révéler être un des compositeurs les plus polonais qui soient.

Ma fracassante carrière de pianiste appartient à un autre temps. Un temps où l’homme laissait fleurir en lui de nobles aspirations, où la beauté artistique était attachée au sentiment et à la sensibilité et jaillissait de l’élan naturel et conjoint d’une belle âme et de mains savantes et agiles, où la société savait récompenser chacun de ce qui lui était dû, où les grands accédaient à la grandeur.
Ce temps n’existe plus. Le chaos s’est immiscé dans les choses de ce siècle, insidieusement ; l’homme a perdu son cap, l’art sa raison d’être. Les grandes figures du passé ont été piétinées, renversées par l’insensible, l’incompréhensible, l’inhumain. Les dieux de l’inspiration spontanée remis au placard, la froideur de l’intelligence calculatrice a pris leur place et tente de séduire la sensibilité par ses artifices, pour mieux la dévorer… La mienne ne peut se résoudre à se laisser duper. Pris dans cette vague, je ne me relève pas, mon esprit tourne telle une girouette et mon port d’attache n’est plus. Jouer, créer, je ne le peux plus.
Pourtant, plus que bien d’autres j’ai passé du temps à apprivoiser mes doigts, mû par une volonté à toute épreuve, envers et contre tous ceux, parmi mes professeurs, qui ont tenté de me convaincre, pauvre fou, que je n’étais pas fait pour être pianiste… J’étais un bon musicien, un compositeur prometteur, et Leszetycki lui-même n’a pas tout de suite cru en moi. Ma technique était imparfaite, car on ne me l’avait jamais apprise ; je m’étais débrouillé tant bien que mal, cherchant en vain la personne qui me révélerait les secrets de cet instrument qui savait aussi bien élever les cœurs que faire chavirer les foules.
Leszetycki se révéla être cette personne tant désirée : il m’apprit la discipline et la nécessité de travailler le jeu, et non seulement jouer. Mes concerts, de plus en plus nombreux, m’ont vite obligé à accepter cette réalité impérieuse, sans laquelle je n’aurais jamais acquis la solidité nécessaire ; et je passai des nuits à m’entraîner entre deux apparitions publiques, à peaufiner des programmes énormes, mettant ensuite un instant à offrir à mon public assoiffé ce que j’avais mis des éternités à bâtir, m’écorchant les mains à ne pas décevoir, ruinant ma santé pour respecter mes engagements.

Mais, alors que je triomphais dans les plus grandes salles de concert du monde, le spectre de ma chère Antonina me hantait toujours, et je ne pouvais penser à notre fils sans éprouver un sentiment mélangé de rage et de culpabilité. Qu’a-t-il fait, ce pauvre enfant, pour être atteint d’une telle infirmité ?! Et qu’y pouvais-je, moi, qui n’arrivais pas à l’approcher sans qu’une vague de sanglot ne montât jusqu’à ma gorge nouée, et qui n’ai pas su être un père pour lui ? Son poids m’oppressait, j’étais trop faible, il me faisait penser à elle, je ne pouvais supporter cela.
Je ne peux pourtant résumer ma passion pour la musique à une échappatoire. Toutes ces mélodies que j’ai entendues dès la plus tendre enfance, ces rites campagnards accompagnés de danses qui avaient toujours le pouvoir d’aller au plus profond de moi et de m’incliner soit vers une noble nostalgie qui, par sa tenue altière, arrivait, je ne sais comment, à ne pas verser dans un flot de larmes amères qui coulent de l’irrémédiablement perdu, soit vers une sérénité souriante, quand ce n’était pas vers une allégresse franche et malicieuse qui menait parfois vers un élan de folie oubliant son corps et se libérant dans une trajectoire inespérée et insensée… Tout cela débordait de moi à tel point qu’il m’aurait été inconcevable de ne pas le libérer, après l’avoir assimilé, en redonnant à toutes ces musiques l’existence matérielle qu’elles avaient momentanément quittée en intégrant mon être. Je n’avais pas le choix, et les évènements douloureux que j’ai eu à subir n’ont fait que renforcer ma détermination.
Mais la musique ne me suffisait pas, et je sentais, au fond de moi, que mon pouvoir d’électriser les foules était destiné à servir d’autres desseins… Défendre les intérêts de ma patrie, celle que j’ai quittée dépiécée et que j’ai vue envahie… J’en ai toujours senti la nécessité impérieuse, et le dégoût que je ressentais envers la domination et la tyrannie se joignit à la volonté d’interférer en faveur de ce qui m’a été si proche que, malgré les années d’éloignement, j’en reste marqué à jamais, et en même temps si douloureux, que je n’ai jamais pu me résoudre à le revoir en face.
J’ai pu, grâce à Dieu, accomplir bien des choses en ce domaine… les talents de pianiste concertiste et d’homme-orateur politique ne se rejoignent-ils pas en bien des points ? Cette capacité à sentir la température d’un auditoire, l’instinct de deviner la manière adaptée pour lui parler, sans le moins du monde pervertir sa pensée propre, mais plutôt en laissant l’ambiance présente la porter à sa façon, se laisser emporter par les étincelles dans l’air sans perdre le contrôle, sans se brûler les ailes… Cette double activité me paraissait nécessaire, et je ne la ressens nullement comme un éparpillement suspect ou dilettante, mais bien comme une même énergie canalisée différemment. Il y a des moments où la satisfaction de procurer un plaisir esthétique ne suffit pas. Surtout lorsqu’on se trouve face à des hommes qui subissent la guerre ou la tyrannie.
Aujourd’hui, je suis un homme du passé. Un passé brillant, plein de lumières étincelantes et de miroirs finement sculptés, dans lesquels se reflètent, tournoyants, des visages nobles, taillés dans la masse, et des regards clairs, radieux et francs, telles les âmes dont ils constituaient le prolongement direct. Et j’entends encore ces voix aux intonations sinueuses, qui nous entraînent à les suivre dans des chemins serpentant vers des hauteurs suspendues, et qui s’arrêtent un instant, le temps d’apprécier leur fragilité, leur écho fugitif. Je m’enfonce dans ce nuage qui m’emporte de plus en plus loin du réel que je ne veux plus voir, dans lequel je ne me reconnais plus. Ma chevelure, jadis dorée et flamboyante, se dissout dans la brume grise, et mon visage aux traits aquilins devient flou. Les contours s’effacent.
Après des années d’âpres efforts, le Chevalier à la Triste Figure s’est, en son temps, résigné à l’abandon. Je dois, à mon tour, accepter que mon existence dans ce siècle ne devienne futile, et réaliser que mes combats se soient jadis orientés contre des géants devenus aujourd’hui de risibles moulins.
Peut-être, dans des époques futures, existera-t-il des personnes qui sauront apprécier mon œuvre. À l’échelle de l’Histoire de la musique, je n’ai sans doute rien d’un génie, d’un démiurge qui sait faire apparaître des mondes nouveaux, ou plutôt révéler ceux qui n’attendaient que cela ; car je crois que la pierre renferme déjà la sculpture et les sons ne demandent qu’à être assemblés en drames. Je ne renie pas mes maîtres, je ne me cache pas de leur influence, et j’ai toujours préféré me situer comme commentateur passionné de cette époque qui m’a tant émerveillé, que j’ai aimée et dont je me sens toujours si proche. Et je suis sûr que mon œuvre a encore le pouvoir de résonner en des oreilles sans préjugé et en des cœurs qui ne se renient pas. […]

Extrait des Mémoires d’un Paderewski imaginaire, de D. Leszczynski.

Né en 1978 à Lublin (Pologne), David Leszczynski est admis à l'âge de 15 ans, dans la classe de piano de Michel Béroff au Conservatoire National Supérieur de Musique de Paris. Il y obtient, trois ans plus tard, le Premier Prix et le Diplôme de Formation Supérieure de piano (mention "très bien"), et est choisi par la Fondation de France pour recevoir le prix "Drouet-Bourgeois", récompensant un pianiste du Conservatoire particulièrement prometteur.
Depuis, il se produit régulièrement en concert en France (Auditorium Saint-Germain, Ambassade de Pologne, Institut Culturel Polonais et Hongrois, Salle Rossini, Salle Adyar, Auditorium St Eustache, Espace Reuilly, Maison Claude Debussy…) et à l’étranger (Belgique, Espagne, Italie, Pologne, Portugal), aussi bien en récital qu’avec orchestre, dans le cadre d’émissions radiophoniques (France-Musiques, France-Culture) ou de festivals (Villecroze, Moulin d’Andé, Flaine, Piano des Dômes…), aux côtés de partenaires renommés tels que Xavier Phillips, Maryvonne Le Dizès ou Vincent David. Il est l’invité de plusieurs master-classes (et notamment avec György Sebók à Ernen, en Suisse ; avec Alexander Satz, Vadim Monastyrski, Mikhaïl Voskressensky, Aldo Ciccolini, Jean-François Heisser, Marie-Josephe Jude…). Il est lauréat du Concours International de piano Cittá di Camaïore en Italie.
Il étudie l’écriture au Conservatoire de Paris auprès d’Alain Bernaud, Jean-Claude Henry et Thierry Escaich et reçoit 3 Premiers Prix (harmonie, contrepoint, fugue et formes), tous à l’unanimité des différents jurys. Également attiré par l’accompagnement, il est diplômé de la classe de Jean Koerner (Prix avec mention Très Bien à l’unanimité). A la rentrée 2005, il est nommé professeur d’écriture (fugue et formes) au CNSMDP. Par ailleurs, titulaire du Certificat d’Aptitude à l’enseignement, il est professeur de piano au Conservatoire Maurice Ravel à Paris.

 

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Born in Lublin (Poland) in 1978, David Leszczynski studied at the Conservatoire de Paris, graduating with First Prize in piano, piano accompaniment, harmony, counterpoint and fugue, along with a Certificate of Aptitude for piano teaching.

He has taught musical notation (fugue and form) at the Conservatoire de Paris and piano at the municipal conservatoires in Paris. He performs regularly as a soloist and chamber musician at concerts in both France and abroad.

 

Ignacy Jan Paderewski (1860-1941) was a pianist, composer and politician. His career as a concert performer would take him beyond the frontiers of his native country to perform in the greatest concert halls of the world, sometimes giving over a hundred concerts per year. As a composer, most of his work is based on the piano, but it also includes chamber music, orchestral and opera pieces.

Paderewski was not only a composer, however, he was also a well-known statesman. During World War I, he defended the Polish cause in the United States before becoming ambassador for Poland and provisional head of state. He continued his political engagement during World War II as president of the Polish National Council in exile in the United States in 1940.

Although Paderewski would spend most of his life far away from Poland, his native country and musical heritage would remain the centre of his concerns throughout his life.

Unlike Paderewski, Karol Szymanowski (1882-1937) would not experience the same runaway success in his lifetime. Today, however, he is considered to be one of the leading Polish composers. An avid traveller, he roamed his way across Europe with his musician friends (among which included Arthur Rubinstein), the United States and Northern Africa. These exotic experiences would leave lasting influences on his music tinging it with impressionist colours, which are expressed in the brilliant orchestrations and in a sense of harmony unrivalled in Debussy or Ravel. Polish folklore, however, remains a central element of his musical imagination, as shown in his opera Król Roger (‘King Roger’).

Translation : Géraldine Ring

 

 



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